Aristote

La Poétique

« Avec La Poétique, Aristote a donné à l’humanité l’un des premiers et des plus puissants outils pour comprendre l’art comme une forme de connaissance et non comme un simple divertissement. »

Introduction

 

La Poétique d’Aristote est l’un des rares textes anciens à traiter directement de la philosophie esthétique.

Cependant, contrairement à ce que pourrait laisser croire son titre, il ne s’agit pas d’une réflexion sur l’art dans sa globalité, mais d’une analyse spécifique de la tragédie et, dans une moindre mesure, de l’épopée.

Ce texte, probablement constitué de notes destinées à un cours, se caractérise par un style discontinu, des digressions, et des lacunes, témoignant d’une œuvre inachevée.

Le contexte de sa rédaction est marqué par la fin de l’âge d’or de la tragédie grecque. Aristote médite sur un art dont le rayonnement maximal remonte à des décennies avant lui, notamment avec Sophocle et Euripide.

À travers ses analyses, il élabore une réflexion sur l’imitation, le rôle des passions et la structure narrative qui donne à la tragédie sa puissance expressive. 

 

La tragédie selon Aristote

Au cœur de La Poétique se trouve une définition précise de la tragédie  :

  • Un art mimétique : La tragédie représente des actions humaines par imitation (mimêsis).
  • Une finalité cathartique : Elle opère une purification des passions (katharsis).
  • Une structure codifiée : Elle repose sur des éléments tels que le récit (muthos), les personnages (êthos), et le langage rythmé.

 

Plus qu’un simple genre théâtral, la tragédie est pensée comme une expérience esthétique et éthique, illustrant à la fois les possibilités de l’action humaine et les tensions morales qui la traversent.

 

Au sein de la littérature, le théâtre est le genre littéraire mimétique par excellence puisqu’il met en scène le fictif comme s’il était réel. Jean-Pierre Vernant et Pierre Vidal-Naquet font remarquer qu’en raison d’un tel traitement du fictif, cet art ne pouvait naître que « dans le cadre du culte de Dionysos, dieu des illusions, de la confusion et du brouillage incessant entre la réalité et les apparences, la vérité et la fiction » (Mythe et tragédie).

 

La Poétique est le texte fondateur de la dramaturgie occidentale. Tous les théoriciens s’y réfèrent, explicitement ou non. Le théâtre humaniste, en Italie puis en France, le théâtre classique français, sont nés d’une relecture attentive d’Aristote, même quand les auteurs s’en démarquent, même quand ils interprètent à contresens sa pensée. Les grands baroques français et étrangers, qui prônent l’irrégularité, tel Lope de Vega dans L’Art de faire des comédies, contestent Aristote, mais ne peuvent que se positionner par rapport à lui. Les théoriciens du drame, Diderot, Beaumarchais, Louis Sébastien Mercier en France, Lessing en Allemagne, Goldoni en Italie, engagent avec lui, par-delà les siècles, un interminable dialogue qui se continue, plus polémique encore à l’époque romantique, avec Stendhal, Vigny, Hugo. Plus proches de nous, Brecht et Artaud, pourfendant violemment les conceptions d’Aristote qui symbolise à leurs yeux la dramaturgie occidentale, soulignent de ce fait l’importance de La Poétique.

 

Aristote revisité à l'époque romaine: Horace

Aristote revisité à l'époque classique

Key concepts

●      La Poétique d’Aristote est un texte ancien traitant de la philosophie esthétique, se concentrant sur la tragédie et l'épopée.

●      Le texte est caractérisé par un style discontinu et des lacunes, témoignant d'une œuvre inachevée.

●      Aristote médite sur un art dont le rayonnement maximal remonte à des décennies avant lui, notamment avec Sophocle et Euripide.

●      La tragédie est pensée comme une expérience esthétique et éthique, illustrant les possibilités de l’action humaine et les tensions morales.

●      La Poétique est le texte fondateur de la dramaturgie occidentale, influençant de nombreux théoriciens et dramaturges à travers les siècles.

Quelle est la finalité de la tragédie selon Aristote ?

  1. Un divertissement léger
  2. Une célébration de la joie
  3. Une critique sociale
  4. Une purification des passions (katharsis)

Quel est l'élément central de la structure de la tragédie ?

  1. Le poème épique
  2. La comédie
  3. Le dialogue humoristique
  4. Le récit (muthos)

Qui sont les dramaturges mentionnés comme ayant influencé la tragédie grecque ?

  1. Hugo et Diderot
  2. Molière et Racine
  3. Sophocle et Euripide
  4. Shakespeare et Brecht

Quel est le genre littéraire considéré comme mimétique par excellence ?

  1.  La poésie
  2. Le théâtre
  3. Le roman
  4. L'essai

Quel est le contexte de la rédaction de La Poétique ?

  1.  La fin de l'âge d'or de la tragédie grecque
  2. Le début de la Renaissance
  3. La période baroque
  4. L'essor du roman moderne

Quel est le style de La Poétique d'Aristote ?

  1. Discontinu avec des digressions
  2. Poétique et rythmique
  3. Simpliciste et direct
  4. Fluide et linéaire

Qui a contesté les idées d'Aristote dans le théâtre baroque ?

  1. Lope de Vega
  2. Victor Hugo
  3. Jean Racine
  4. Diderot

Définition de la tragédie

 

La tragédie (tragôdia), selon Aristote, est  la représentation (mimêsis-imitation) d'une action noble et de caractère élevé (praxeôs spoudaias).

Ce terme, "praxis", désigne à la fois l'acte et ses conséquences, impliquant une responsabilité totale de l'acteur tragique. Loin d'esquiver cette responsabilité, le héros l’assume pleinement, comme l'illustre Antigone :

Créon : Et toi, toi qui restes là, tête basse, avoues-tu ou nies-tu le fait?

Antigone : Je l’avoue et n’aie garde, certes, de le nier » (Antigone, v. 441-443).

 

Dans la tragédie, l’acte héroïque se caractérise par le terme spoudaios, qui signifie "valeureux". Cet acte ne se contente pas de suivre des normes extérieures : il établit lui-même sa propre valeur, incarnant une éthique fondatrice. Pour Aristote, le spoudaios est celui qui perçoit le vrai avec justesse, devenant une référence universelle, comme il l’explique dans Éthique à Nicomaque :

« Le valeureux se distingue principalement en ceci qu’il voit le vrai en toutes choses, comme s’il en était la règle et la mesure. »

Dans Œdipe roi, bien que le héros soit incapable de "voir" la vérité au sens propre, son acte – la quête obstinée de la connaissance – illustre une valeur éthique majeure. En affrontant les conséquences terribles de ses découvertes, il dévoile la condition humaine dans toute sa complexité, montrant le courage qu’implique la recherche de la vérité.

Key concepts

  • La tragédie est un art mimétique, représentant des actions humaines par imitation (mimêsis).
  • Elle a une finalité cathartique, opérant une purification des passions (katharsis).
  • Elle repose sur une structure codifiée avec des éléments tels que le récit (muthos), les personnages (êthos), et le langage rythmé.
  • La tragédie est une expérience esthétique et éthique, mettant en scène le fictif comme s’il était réel.

Quelle est la définition de la tragédie selon Aristote ?

  1. La représentation d'une action noble et de caractère élevé.
  2. Un récit historique sans personnages.
  3. Une simple comédie sans profondeur.
  4. Une danse théâtrale sans dialogue.

Quel terme désigne l'acte et ses conséquences dans la tragédie ?

  1. Praxis
  2. Éthique
  3. Théâtre
  4. Mimêsis

Que signifie le terme 'spoudaios' dans le contexte de la tragédie ?

  1. Faible
  2. Valeureux
  3. Indifférent
  4. Égoïste

Quel est le principal trait du héros tragique selon Aristote ?

  1. Il assume pleinement sa responsabilité.
  2. Il ne ressent aucune émotion.
  3. Il est toujours victorieux.
  4. Il fuit ses responsabilités.

Dans 'Œdipe roi', quel est l'acte héroïque du héros ?

  1. La guerre contre les dieux.
  2. La quête obstinée de la connaissance.
  3. La recherche de la richesse.
  4. La fuite de son destin.

Les caractéristiques de l’acte tragique

  • Un acte extrême :

    Spoudê désigne encore la promptitude, l’effort volontaire, le zèle et l’ardeur : l’acte tragique est toujours un acte extrême, marque d’un caractère exceptionnel. On pourrait traduire : “un acte ardent”.
 Un acte ardent « et complet », « mené jusqu’à son terme » , « conduit jusqu’à sa fin »  : teleias. Le telos est le point de maturation de la crise, l’acmé d’un devenir. C’est seulement après la tragédie qu’on peut dire que tout est accompli. L’acteur tragique porte son acte jusqu’à une limite extrême. Le héros tragique est un “jusqu’au-boutiste” :

    Exemple :

    « Jocaste : Arrête-toi pourtant, crois-moi, je t’en conjure.
    Œdipe : Je ne te croirai pas, je veux savoir le vrai . »
    (Œdipe-Roi, v. 1064-1065).

    • Un acte ayant une “certaine étendue”  :

    Un acte « d’une certaine étendue » (megethos ekousês). Le temps tragique est “compté” : l’acte possède origine et fin, arkhê et telos. remarquons que megethos peut désigner à la fois la grandeur mesurable dans l’espace comme dans le temps, et la grandeur morale (force et grandeur d’âme). Ainsi la grandeur propre à la tragédie, c’est non seulement l’intervalle temporel qui limite le déploiement de l’acte, mais aussi la grandeur d’âme que le héros, par son acte, manifeste aux yeux du monde.

      Cette grandeur réside autant dans le déploiement narratif que dans la force d’âme manifestée par le héros. Aristote ne réduit pas cette grandeur à une prudence humaniste : la sagesse tragique repose sur une vérité démesurée, que seuls les héros osent révéler. Si le coryphée conclut souvent la tragédie par une leçon mesurée, cela n’atténue en rien l’intensité de la crise mise en lumière sur scène.

       

      Key concepts

      Les caractéristiques de l’acte tragique:

      • Un acte extrême, marqué par un caractère exceptionnel et mené jusqu’à son terme (telos).
      • Un acte ayant une certaine étendue, avec une origine et une fin, manifestant une grandeur d’âme.
      • La parole tragique est agissante, rythmée, mélodique et chantée, jouant un rôle central dans la mise en valeur de l’acte.
      • La représentation dramatique est composée de parties distinctes, soulignant l’effectivité de l’acte accompli.

      Qu'est-ce que l'acte tragique selon Aristote ?

      1. Un acte banal et quotidien
      2. Un acte sans conséquence
      3. Un acte humoristique
      4. Un acte extrême et ardent

      Que signifie 'telos' dans le contexte de l'acte tragique ?

      1. Le début de l'histoire
      2. Le point de maturation de la crise
      3. Le personnage principal
      4. La fin de la tragédie

      Qu'est-ce que 'megethos' peut désigner dans le contexte tragique ?

      1. La petitesse d'esprit
      2. L'absence de conflit
      3. La légèreté des actions
      4. La grandeur morale et mesurable

      Quelle est la caractéristique d'un héros tragique ?

      1. Être un anti-héros
      2. Être un 'jusqu'au-boutiste'
      3. Être un personnage comique
      4. Être un personnage secondaire

      Quel est le rôle du héros tragique selon le texte ?

      1. Manifester une grande force d'âme
      2. Fuir ses responsabilités
      3. Chercher la richesse
      4. Éviter les conflits

      Que représente l'acte tragique dans le temps ?

      1. Un acte compté avec origine et fin
      2. Un acte aléatoire
      3. Un acte sans structure temporelle
      4. Un acte éternel

      Hêdusmenon logon (parole relevée d’assaisonnements) :

      Quelle est donc cette salade qu’on nous “assaisonne” ici?

      L’assaisonnement de la cuisine tragique est plutôt acide. La parole libre (le héros tragique ne parle pas un “langage”, il prononce une parole) est en effet le “sel” de la représentation tragique. Dans la tragédie en effet, les mots sont des actes, les personnages sont littéralement pris au mot, et il suffit parfois d’un mot imprudent pour tuer. La parole tragique est parole agissante. 

      Aristote précise que cette parole :

      • est rythmée (ruthmos), mélodique (harmonia) et chantée (melos),
      • alterne avec les chants du chœur, renforçant l’expressivité dramatique.

      La parole joue un rôle central dans cette mise en valeur. Aristote décrit un « langage relevé d’assaisonnements » (hêdusmenon logon), où la parole devient un acte en soi. À travers l’alternance entre dialogues expressifs et chants lyriques du chœur, la tragédie orchestre un rythme qui souligne les ruptures et les moments clés de l’action. La scène tragique, loin de se limiter à la fiction ou au merveilleux, est un espace de vérité où l’acte essentiel se manifeste.

       

      Cette notion de rythme est plus explicite encore dans la suite de la définition.


      Représentation dramatique :

      L’acte tragique se compose de parties, de “moments”, chacun mis en valeur par un certain type de discours : à la jactance d’Œdipe le tyran succède la lamentation d’Œdipe le banni ; entre les deux, la “stichomythie” d’Œdipe l’enquêteur.

       

      Aristote distingue dans la tragédie entre le prologue, l’épisode, l’exode et le chant du chœur, ce dernier se divisant lui-même en parodos et stasimon.

       

      Comprenons que le déroulement de l’acte tragique n’est pas continu : il est fait de ruptures, il se compose de formes distinctes. Un mouvement que scandent ainsi des figures définies, c’est ce qu’on appelle un mouvement rythmé.

       

      Le rythme est en effet pour Aristote un facteur essentiel de la représentation en général : « Tous les arts produisent la représentation par le rythme  par la parole et par la mélodie » .
 « Un acte mis en œuvre par les personnages du drame et sans avoir recours à la narration » , « par les personnages en action et non au moyen d’un récit » .

      Un acte réellement effectué et non , réponse d’un messager, relation, récit. Pourtant, c’est un vieux serviteur de Laïos qui raconte le parricide ; c’est un messager qui dit Œdipe se crevant les yeux ; c’est encore un messager qui raconte le geste d’Antigone, ou la profanation, par Créon, de la sépulture. C’est encore un serviteur qui, dans l’exodos de l’Iphigénie à Aulis dit la substitution miraculeuse à la victime d’une biche d’Artémis. Et c’est dans la boîte noire de la skênê qu’Oreste, par deux fois, donne un coup mortel à Clytemnestre ; seul nous l’apprend le délire inspiré de Cassandre, demeurée au seuil du palais.....

       

      Par delà la diversité des œuvres, Aristote tient à souligner l’effectivité de l’acte accompli. La scène du théâtre tragique n’est pas un espace de fiction ni de merveilleux, elle est au contraire le lieu d’une épreuve de vérité, la mise en évidence, brutale et sans fard, d’un acte essentiel. C’est au théâtre seulement qu’on cesse de faire semblant. La scène tragique est le domaine où la vérité se manifeste.


       

       

      Quel est le rôle de la parole dans la tragédie selon Aristote?

      1. La parole est uniquement descriptive.
      2. La parole est un acte en soi.
      3. La parole est un simple dialogue sans impact.
      4. La parole n'a pas d'importance.

      Quels sont les éléments qui composent l'acte tragique?

      1. Les chants et les danses.
      2. Le prologue, l'épisode, l'exode et le chant du chœur.
      3. Le prologue et l'épilogue uniquement.
      4. Les dialogues et les narrations.

      Ou un sous-titre pour plus de clarté

      Écrivez une description pour ce sous-titre ou modifiez-le selon vos souhaits

      Qu'est-ce que la 'stichomythie' dans la tragédie?

      1. Un échange rapide de répliques entre personnages.
      2. Une description de la scène.
      3. Un monologue d'un personnage.
      4. Un chant du chœur.

      Quel est le but de l'alternance entre dialogues et chants dans la tragédie?

      1. Diminuer l'impact émotionnel.
      2. Renforcer l'expressivité dramatique.
      3. Rendre l'histoire plus complexe.
      4. Créer une ambiance légère.

      Qu'est-ce qui caractérise la scène tragique selon Aristote?

      1. C'est un lieu de célébrations.
      2. C'est un lieu de divertissement.
      3. C'est le lieu d'une épreuve de vérité.
      4. C'est un lieu de répétitions.

      Émotions suscitées : pitié et crainte (eleos kai phobos) :

      • Ces émotions :
        • provoquent soit adhésion et compassion,
        • soit horreur et répulsion.
      • Elles relèvent de l’envoûtement mimétique, contagieux par sympathie ou antipathie.

      Cet acte, selon Aristote, doit susciter pitié et crainte (eleos kai phobos), opérant ainsi une purification (katharsis) des passions.

       

      Katharsis (purification) :

      Cette catharsis, proche d’une "purification" rituelle  joue un rôle civil et religieux. Dans Les Euménides d’Eschyle, par exemple, la faute d’Oreste est lavée et les Érinyes se transforment en figures de paix. Cette purification, loin d’expulser ou de refouler, réconcilie le héros avec lui-même et la cité.

       

      Deux remarques :

      • cette purification rituelle semble bien éloignée du déballage pratiqué sur le divan de l’analyste. A ce propos, remarquons que rien ne dit que le sujet de la catharsis est le spectateur qui, après avoir tremblé par compassion et répulsion, retrouve enfin la paix quand tout est dit ; ce peut être tout aussi bien l’acteur, le héros lui-même qui, après avoir souffert la passion tragique, devient enfin ce qu’il était et se réconcilie avec lui-même.
      • La purification n’a pas grand rapport non plus avec le rite du bouc émissaire : dans Les Euménides, la katharsis n’est pas expulsion du criminel hors la cité, mais au contraire pardon accordé à Oreste qui trouve accueil dans la cité d’Athéna, tandis que les Érynies hors-la-loi se convertissent en servantes de la déesse. C’est pourquoi, sans doute, Aristote peut écrire que la conséquence de la péripétie — qui est le renversement de la situation provoqué par l’acte tragique — n’est ni l’exclusion, ni le refoulement, mais au contraire la reconnaissance, anagnôrisis.
 

       

      Récapitulons ces diverses remarques, et traduisons : « La tragédie est la représentation d’un acte valeureux, accompli jusqu’au bout, ayant sa propre grandeur, et mis en valeur par la parole selon les formes distinctes qui la composent ; un acte réellement effectué et non simplement récité qui, par compassion et répulsion, opère parfaitement la purification de ces passions ».

       

      Quelles émotions sont suscitées selon Aristote ?

      1. Amour et haine
      2. Joie et colère
      3. Pitié et crainte
      4. Indifférence et mépris

      Quel est le rôle de la katharsis dans la tragédie ?

      1. Divertissement du public
      2. Renforcement des conflits
      3. Purification des passions
      4. Augmentation de la souffrance

      Dans Les Euménides, que devient Oreste après sa faute ?

      1. Il est tué par les Érinyes
      2. Il devient roi d'Athènes
      3. Il est pardonné et accueilli
      4. Il est exilé et condamné

      Comment les Érinyes se transforment-elles dans Les Euménides ?

      1. En figures de paix
      2. En spectres vengeurs
      3. En créatures de la nuit
      4. En déesses de la guerre

      Quel est le but de l'envoûtement mimétique ?

      1. Éveiller la curiosité
      2. Provoquer sympathie ou antipathie
      3. Créer de la confusion
      4. Détourner l'attention

      Quelle est la conséquence de la péripétie dans la tragédie ?

      1. Exclusion du héros
      2. Silence des acteurs
      3. Révolte du public
      4. Reconnaissance (anagnôrisis)

      Qu'est-ce qui distingue la katharsis de l'analyste ?

      1. Elle est une simple confession
      2. Elle est un divertissement
      3. Elle est un acte de vengeance
      4. Elle est une purification rituelle

      L'imitation (mimêsis) selon Platon

       

      Dans la philosophie de Platon, la mimêsis (imitation) est une idée importante, surtout pour comprendre comment elle s'oppose à la recherche de la vérité et influence l'âme humaine. Pour Platon, la mimêsis relève surtout de l’ordre de l’imaginaire : elle a pour fonction de produire une belle image, dont l’harmonie et la symétrie ont pour but de séduire. Contrairement à Aristote, qui voit l'imitation comme un moyen de comprendre des idées profondes et d'éduquer, Platon considère qu'elle éloigne de la vérité et peut être dangereuse.

       

      La filiation platonicienne

      Depuis Platon, la critique du théâtre a souvent été marquée par une méfiance envers les effets de la mimêsis sur l’homme, une influence jugée corruptrice. Cette critique trouve des échos chez les Pères de l’Église, comme Tertullien et saint Augustin, et s’étend jusqu’aux moralistes du XVIIe siècle, tels que Nicole et Bossuet, puis à Rousseau au XVIIIe siècle. Tous partagent une vision du théâtre comme un lieu d’illusion et de séduction dangereuse, opposée à la recherche de la vérité.

      Chez saint Augustin, notamment dans Les Confessions, cette condamnation repose sur l’idée d’une compassion faussement suscitée par les spectacles. Le spectateur, touché par les souffrances feintes des personnages, s’abandonne à une émotion jugée malsaine et illusoire. Cette "joie fondée sur la douleur" est perçue comme une étrange maladie de l’âme, alimentée par une mimêsis qui détourne de la vraie miséricorde, celle qui vient de Dieu. Saint Augustin reprend ici l’analyse platonicienne de la contagion mimétique, décrivant le théâtre comme un lieu de corruption spirituelle, où le spectateur se laisse entraîner dans une identification émotionnelle nuisible.

      Au XVIIIe siècle, Rousseau poursuit cette critique en dénonçant la complicité morale du spectateur avec les crimes représentés sur scène. Selon lui, en applaudissant des actes fictifs immoraux, le spectateur sort du théâtre comme un complice des scènes auxquelles il a assisté, contaminé par cette fausse réalité.

      Même des figures comme Artaud, bien qu’en renversant les valeurs, reconnaissent la puissance contagieuse du théâtre. Tandis que saint Augustin voyait dans cette contamination une raison de condamner l’art dramatique, Artaud célèbre ce pouvoir comme essentiel au théâtre. Cependant, cette force, qu’elle soit perçue comme bénéfique ou néfaste, témoigne de l’impact durable des idées platoniciennes sur la critique du théâtre, centrées sur la mimêsis et ses effets sur l’âme humaine.

       

      Key concepts

      Dans la philosophie de Platon, la mimêsis est une imitation qui s'oppose à la recherche de la vérité. Elle influence négativement l'âme humaine en produisant des images séduisantes mais trompeuses. Contrairement à Aristote, Platon voit la mimêsis comme dangereuse et éloignant de la vérité.

      Imiter, c'est créer une copie d'une copie, éloignant encore plus de la vérité. Le monde sensible est déjà une imitation du monde des Idées ou Formes. La mimêsis produit des simulacres, des images qui cachent la réalité.

      Les artistes, poètes et dramaturges sont critiqués pour séduire sans montrer la vérité. Leurs œuvres touchent aux émotions et détournent de la quête de connaissance. L'art éloigne les gens de la raison.

      La mimêsis attise les désirs et émotions, empêchant la réflexion. Elle manipule les gens et les détourne de la recherche de la vérité.

      L'éducation doit guider l'âme vers les Idées et non vers les apparences trompeuses. La mimêsis rend difficile la distinction entre le vrai et le faux. Elle pousse à chercher la beauté extérieure plutôt que la vérité intérieure.

      Depuis Platon, le théâtre est critiqué pour ses effets corrupteurs à cause de la mimêsis. Saint Augustin et Rousseau partagent cette critique, voyant le théâtre comme un lieu d'illusion. La contagion mimétique est perçue comme une maladie de l'âme. Rousseau critique la complicité morale du spectateur avec les actes immoraux sur scène. Artaud reconnaît la puissance contagieuse du théâtre, bien que de manière positive.

      Quelle est la vision de Platon sur la mimêsis ?

      1. C'est un moyen d'éduquer les gens.
      2. Elle représente la vérité ultime.
      3. C'est une forme d'art supérieure.
      4. Elle est une copie trompeuse de la réalité.

      Pourquoi Platon critique-t-il les artistes ?

      1. Ils favorisent la réflexion.
      2. Ils éloignent les gens de la vérité.
      3. Ils représentent la beauté.
      4. Ils enrichissent la culture.

      Que pense Platon de l'effet de la mimêsis sur l'âme ?

      1. Elle aide à atteindre la vérité.
      2. Elle purifie l'âme.
      3. Elle n'a aucun effet sur l'âme.
      4. Elle attise les désirs et les émotions.

      Quel est le but de l'éducation selon Platon ?

      1. Guider l'âme vers les Idées.
      2. Encourager l'imitation.
      3. Promouvoir l'art et la beauté.
      4. Développer les émotions.

      Comment Platon décrit-il le monde sensible ?

      1. Comme un espace d'illusion.
      2. Comme une imitation du vrai monde.
      3. Comme un lieu de vérité.
      4. Comme la réalité ultime.

      Quelle est la réaction de saint Augustin face à la mimêsis ?

      1. Il l'encourage comme forme d'art.
      2. Il la considère comme une corruption spirituelle.
      3. Il la défend comme un moyen d'éducation.
      4. Il la trouve sans importance.

      Quel sentiment Platon associe-t-il à la mimêsis ?

      1. Elle favorise la vérité.
      2. Elle éveille la compassion.
      3. Elle peut manipuler les gens.
      4. Elle apporte la joie.

      Comment Rousseau voit-il le rôle du spectateur au théâtre ?

      1. Comme un défenseur de la moralité.
      2. Comme un complice des actes immoraux.
      3. Comme un critique de l'art.
      4. Comme un observateur neutre.

      Quel aspect de la mimêsis est critiqué par les moralistes du XVIIe siècle ?

      1. Sa beauté esthétique.
      2. Sa capacité à inspirer l'art.
      3. Son rôle dans l'éducation.
      4. Son effet corrupteur sur l'homme.

      L'imitation (mimêsis) selon Aristote

       

      Chez Platon, le domaine de la mimêsis est celui du simulacre, icône ou idole, qui se substitue, de façon bénéfique ou maléfique, à l’absence du vrai. Penser les “mimêmata”, c’est toujours, pour Platon, réfléchir l’effet, de signification ou de fascination, qu’ils produisent sur l’esprit.


      À l'opposé, Aristote élargit le champ de la mimêsis. Pour lui, la mimêsis ne se limite pas aux effets sémantiques ou esthétiques de la ressemblance ; elle englobe tout l'univers, notamment l'ensemble des êtres qui, animés par un mouvement, tendent vers un but. Contrairement à Platon, qui voit la mimêsis comme un simple reflet des passions humaines et des impressions sensibles, Aristote la place dans le domaine de l'action, de la production concrète. La mimêsis chez Aristote n'est pas une illusion séduisante, mais une puissance créatrice, "poiêtique", qui produit des œuvres effectives et ne se limite pas à l’apparence.

       

      A elle-même sa propre fin, autonome, la représentation tragique est donc absolument une.

      L’âge classique le répétera : la tragédie doit obéir à la règle de l’unité. Reste à déterminer le principe de cette unité poétique : l’unité de lieu n’est pas mentionnée par Aristote, l’unité de temps est à peine évoquée ( “une seule révolution du soleil”). Seule l’unité d’action est, selon Aristote, déterminante. La tragédie n’est pas seulement mimêsis : elle est “mimêsis praxeôs”, représentation d’un acte. Le muthos, qui est l’enchaînement des actions, est  “le principe et comme l’âme de la tragédie”.  L’action, sa nécessité, son rythme, donne à la tragédie sa mesure véritable.

       

      Key concepts

      Pour Aristote, l'imitation (mimêsis) est un principe essentiel de l'action, où chaque action vise à atteindre une fin en imitant un modèle pour tendre vers une existence plus parfaite.

      L'homme est naturellement apte à l'imitation, ce qui lui permet d'acquérir des connaissances et de compléter ce qui est imparfait dans la nature par son art.

      La tragédie, est une œuvre qui imite la structure organique des êtres naturels, avec une cohérence interne et une progression logique, se distinguant par son intensité et sa capacité à toucher le spectateur.

      La vraisemblance d'une tragédie réside dans la cohérence et la logique interne de l'histoire, indépendamment de la réalité extérieure, permettant de persuader le spectateur par une enchaînement nécessaire et crédible des événements.

      Quel est le principe de l'imitation selon Aristote ?

      L'imitation est un principe essentiel de l'action, visant à atteindre une fin et à imiter un modèle pour se rapprocher d'une forme d'existence plus parfaite.

      Quel est le rôle de l'artiste selon Aristote ?

      L'artiste est responsable de son œuvre et doit travailler à accomplir ce qui est encore en puissance dans la nature.

      Comment Aristote définit-il la tragédie ?

      La tragédie est une création organique autonome qui doit avoir un début, un milieu et une fin, imitant la structure des êtres naturels.

      Quelle est la différence entre la tragédie et l'épopée selon Aristote ?

      La tragédie se déroule dans un temps limité et un espace restreint, ce qui renforce son intensité et son émotion, la rendant supérieure à l'épopée.

      Qu'est-ce que la vraisemblance dans la tragédie selon Aristote ?

      La vraisemblance vient de la cohérence et de la logique interne de l'histoire, et non de sa ressemblance avec la réalité extérieure.

      Quel est le but de l'art selon Aristote ?

      Le but de l'art est de compléter et de perfectionner ce qui est imparfait dans la nature.

      Comment Aristote voit-il la relation entre l'art et la nature ?

      L'art de l'homme complète et répare ce qui est manquant ou défectueux dans la nature.

      Pourquoi l'imitation est-elle considérée comme naturelle pour l'homme ?

      Imiter est naturel aux hommes et se manifeste dès l'enfance, permettant d'acquérir des connaissances.

      Quelle est la structure nécessaire d'une tragédie selon Aristote ?

      Une tragédie doit être un tout organisé, avec une structure cohérente qui donne à l'œuvre une unité parfaite.


      Les Différences d'Inspiration

      entre Platon et Aristote sur la Mimêsis

       

      Bien que Platon et Aristote partagent une vision de la mimêsis, leurs conceptions divergent profondément. Pour Platon, la mimêsis appartient principalement à l’ordre de l’imaginaire et de la représentation idéale. Elle sert à créer une belle image, une forme harmonieuse et symétrique destinée à séduire l’esprit. L’unité formelle de la tragédie, selon lui, répond avant tout à un impératif rhétorique : celle de satisfaire les sens et de séduire par son équilibre esthétique. La beauté dans l’œuvre de Platon est une perfection immobile, un idéal figé qui cherche à échapper à la déformation du devenir. Il s’agit d’un idéal pythagoricien, fondé sur des principes de proportion et d’harmonie intemporelles.

      En revanche, Aristote conçoit la mimêsis différemment. Pour lui, la tragédie n’est pas simplement une belle forme à admirer, mais une action qui se déploie selon ses propres lois internes. L’unité organique de la tragédie est avant tout une unité dramatique, liée à l’enchaînement des épisodes et à la nécessité de cette action. Plutôt que de rechercher une beauté statique ou une apparence équilibrée, Aristote insiste sur le mouvement de l’histoire et la manière dont la tragédie produit son propre rythme au fur et à mesure de son déroulement. La beauté, dans sa vision, est un événement qui se manifeste dans le temps et ne peut être séparé du processus de création, de l’accomplissement de l’action tragique.

      L’unité formelle dans la tragédie platonicienne est une recherche de perfection figée, en dehors du temps et du devenir. Mais pour Aristote, la tragédie est avant tout une œuvre en devenir, qui prend vie au fil de sa représentation et qui se révèle dans l’accomplissement même de son action dramatique. Le processus de réalisation, l’enchaînement des événements, le développement logique et nécessaire du muthos — voilà ce qui constitue, pour Aristote, la véritable beauté de la tragédie. Ce n'est donc pas la forme statique de la tragédie qui compte, mais la manière dont elle se construit et se réalise dans le temps, révélant ainsi la puissance de la mimêsis dans son accomplissement.

       

      Quelle est la conception de la mimêsis selon Platon ?

      1. Elle se concentre sur l'action dramatique.
      2. Elle est uniquement une imitation de la réalité.
      3. Elle appartient à l'ordre de l'imaginaire et de la représentation idéale.
      4. Elle n'a aucune valeur esthétique.

      Comment Aristote perçoit-il la tragédie ?

      1. Comme un idéal figé et immuable.
      2. Comme une action qui se déploie selon ses propres lois internes.
      3. Comme une représentation statique de la réalité.
      4. Comme une simple belle forme à admirer.

      Quelle est la beauté selon Platon ?

      1. Une simple imitation de la nature.
      2. Une perfection immobile, un idéal figé.
      3. Un processus de création dynamique.
      4. Un événement qui se manifeste dans le temps.

      Quelle est la différence principale entre Platon et Aristote concernant la tragédie ?

      1. Platon recherche une unité formelle figée, Aristote une unité dramatique en mouvement.
      2. Platon ignore l'esthétique, Aristote la privilégie.
      3. Platon se concentre sur l'action, Aristote sur la forme.
      4. Platon valorise le mouvement, Aristote la statique.

      Quel principe est fondamental pour la vision platonicienne de la beauté ?

      1. Des principes de proportion et d'harmonie intemporelles.
      2. La représentation fidèle de la réalité.
      3. L'importance de l'action dramatique.
      4. Le développement logique des événements.

      Selon Aristote, qu'est-ce qui constitue la véritable beauté de la tragédie ?

      1. La perfection de la forme statique.
      2. L'imitation de la nature.
      3. La recherche de l'harmonie visuelle.
      4. Le développement logique et nécessaire du muthos.

      Imitation d’un acte (mimêsis praxeôs)

       

      Dans la tragédie, les personnages ne sont pas définis par leurs caractères comme dans la comédie ou dans les écrits lyriques. Leur caractère découle de leurs actions. Autrement dit, c'est ce qu'ils font qui révèle qui ils sont. Un personnage tragique ne réfléchit pas sur ses émotions, mais prend des décisions dans des situations difficiles. Par exemple, un personnage peut choisir d’agir (comme Antigone ou Électre), tandis qu’un autre peut fuir la responsabilité (comme Ismène ou Chrysothémis). Ainsi, la tragédie se concentre sur l’acte, pas sur une analyse psychologique profonde.

      En tragédie, le personnage idéal a du "caractère", c'est-à-dire qu’il est capable de prendre une décision et de se battre pour ses convictions, même si cela le conduit au malheur. La tragédie, selon Aristote, montre des personnages supérieurs à la réalité, c'est-à-dire des hommes qui font face au danger sans se dérober. En revanche, la comédie représente des personnages inférieurs, qui échouent à prendre des décisions et restent dans l'agitation sans aller jusqu'à l'action.

      Aristote insiste sur le fait que l'art ne doit pas simplement refléter la réalité : l’artiste crée une image idéalisée ou embellie de l'homme. Dans la tragédie, l'artiste montre des hommes qui agissent courageusement, affrontant le danger sans chercher à s'en dérober. La tragédie valorise l'héroïsme et la force d’âme des personnages, tandis que la comédie met en avant la faiblesse et les échecs.

      En résumé, dans la tragédie, les personnages sont supérieurs non parce qu’ils sont plus beaux ou parfaits, mais parce qu’ils sont prêts à agir face au péril, montrant ainsi une dévotion à l’action qui les élève au-dessus de la moyenne des hommes.

      Key concepts

      Aristote met l'accent sur l'importance des actions (praxis) dans la tragédie, plutôt que sur les personnages eux-mêmes. Les héros tragiques sont définis par leurs actes et les conséquences de leurs décisions, révélant des vérités profondes sur la condition humaine. La tragédie est une imitation d'hommes en train d'agir, et le muthos (fable) organise ces actions en une histoire cohérente et logique centrée sur une action principale. L'unité de la tragédie provient de l'action centrale, et non du héros, montrant l'impact universel des décisions humaines.

      La tragédie ne donne pas de leçon morale mais pousse à réfléchir sur les conséquences des actes humains. Le héros tragique tombe à cause d'une erreur (hamartia), et la tragédie montre la vérité des actions humaines sans jugement moral. Les actions humaines sont incertaines et peuvent entraîner des renversements inattendus. La tragédie isole l'acte pour en comprendre sa vraie nature, et la sobriété est essentielle dans sa représentation.

      Le héros tragique est souvent victime du hasard, ne contrôlant pas complètement sa destinée. L'acte du héros ressemble à la liberté selon Kant, initiant des événements qui échappent à son contrôle. La tragédie suit un rythme propre à l'action, intensifiant l'acte tragique. Le temps tragique est marqué par des moments décisifs qui interrompent le cours normal des choses. La tragédie naît de la rencontre entre le hasard (tukhê) et la liberté humaine, et l'interaction entre un destin aveugle et la volonté humaine responsable est essentielle.

      Dans la tragédie, les actions des personnages provoquent un bouleversement de l'ordre du monde, créant un déséquilibre qui doit être réparé. Aristote décrit cela comme un "agencement systématique des actes". Par exemple, dans "Antigone", la rébellion de l'héroïne change la situation, transformant Créon de tyran puissant en homme accablé. La structure complexe de la tragédie, avec des péripéties et des révélations, intensifie l'histoire. Les oppositions entre bonheur et malheur sont liées à la séparation entre mortels et dieux, les dieux hostiles amplifiant les actions humaines. Contrairement aux dieux grecs, le dieu chrétien n'est pas tragique, car il s'incarne dans la victime du sacrifice et cherche le salut de l'homme.

      L'ironie tragique crée une ambiguïté entre paroles et actions, rendant chaque action dramatique et imprévisible. Dans "Agamemnon" d'Eschyle, Clytemnestre manipule les mots pour préparer la trahison de son mari. Aristote distingue le logos (langage logique) de la lexis (langage poétique), cette dernière dominant dans la tragédie pour exprimer des sentiments complexes. Les mots dans la tragédie ont un pouvoir magique, pouvant blesser ou tuer. Les contradictions dans la tragédie sont profondes et inséparables, révélant leur vérité à travers l'événement final. Les métaphores jouent un rôle clé, permettant d'exprimer les tensions du moment tragique.

      Quel est le rôle principal des actions dans la tragédie selon Aristote ?

      Les actions sont centrales dans la tragédie car elles définissent les personnages et donnent un sens à leur vie.

      Comment Aristote décrit-il la tragédie par rapport à l'éthique ?

      Aristote dit que la tragédie ne juge pas les actions comme bonnes ou mauvaises, mais montre simplement leurs conséquences.

      Qu'est-ce que le muthos dans une tragédie ?

      Le muthos est l'organisation des actions en une histoire cohérente et logique, centrée autour d'une action principale.

      Quelle est la différence entre la tragédie et l'épopée selon Aristote ?

      La tragédie montre l'essence des actions humaines de manière sobre, tandis que l'épopée exagère les exploits.

      Comment Aristote définit-il le héros tragique ?

      Le héros tragique est souvent une victime du hasard, dont les actions déclenchent une chaîne d'événements incontrôlables.

      Quel est l'impact du temps sur la narration dans une tragédie ?

      Le temps dans une tragédie est marqué par des moments décisifs, et non linéaire, ce qui intensifie l'action.

      Comment la tragédie représente-t-elle la liberté humaine ?

      La tragédie montre que l'homme, en exerçant sa liberté, peut provoquer des bouleversements dans le monde.

      Quelle est la relation entre le hasard et la liberté dans la tragédie ?

      La tragédie naît de l'interaction entre le hasard et la liberté humaine, chacun influençant le cours des événements.

      Qu'est-ce que l'hamartia dans le contexte tragique ?

      L'hamartia est une erreur tragique commise par le héros, qui conduit à sa chute.

      Pourquoi Aristote considère-t-il la tragédie comme l'art le plus noble ?

      Il la considère comme noble car elle fait revivre des grands mythes et héros, rendant leurs actions visibles et actuelles.

      Qu'est-ce que la mécanique du renversement dans une tragédie ?

      C'est le mécanisme par lequel un acte déclenche une série d'événements qui bouleversent l'ordre du monde, créant un déséquilibre à réparer.

      Comment Aristote décrit-il l'action tragique ?

      Il explique que l'action tragique doit être complexe, avec des moments de révélation et de péripéties, apportant des changements importants dans l'histoire.

      Quel est un exemple de retournement de situation dans Antigone ?

      La rébellion d'Antigone change la situation, transformant Créon d'un tyran puissant en un homme accablé par sa défaite.

      Quelle est la différence entre le logos et la lexis selon Aristote ?

      Le logos est un langage logique utilisé pour débattre, tandis que la lexis est un langage poétique qui exprime des émotions et des intentions profondes.

      Comment Clytemnestre manipule-t-elle Agamemnon dans l'Agamemnon d'Eschyle ?

      Elle feint l'inquiétude pour lui, tout en préparant secrètement sa trahison, créant une tension entre ses paroles et ses actes.

      Quel rôle jouent les métaphores dans la tragédie ?

      Les métaphores permettent d'exprimer des sentiments ambigus et des vérités complexes, reflétant les tensions du moment tragique.

      Pourquoi la tragédie grecque ne comporte-t-elle qu'une seule péripétie ?

      La péripétie est située au dénouement et marque le moment clé où la situation bascule entre le nœud et le dénouement.

      Comment le dieu chrétien diffère-t-il du dieu tragique dans la tragédie ?

      Le dieu chrétien choisit de se faire humain et de sauver sa créature, tandis que le dieu tragique exige souvent des actions humaines démesurées.

      Quel effet produit le rythme tragique sur le spectateur ?

      Il entraîne le spectateur dans le dénouement dramatique du héros, créant une intensité émotionnelle.

      Comment la tragédie explore-t-elle le destin ?

      Elle le fait à travers des moments d'ambiguïté où les actions peuvent basculer, révélant une double vérité qui rend chaque action dramatique.


      La catharsis (khatarsis)

       

      La katharsis est purification des passions. Non pas de toute passion, mais de deux précisément nommées : la pitié (eleos) et la crainte (phobos). Curieusement, ces deux passions sont presque toujours nommées ensemble. Pourquoi elles plutôt que d’autres? Aristote s’inscrit ici dans une longue tradition qu’il renouvelle pourtant. Il nous faut donc d’abord comprendre le sens et la valeur du couple pitié/crainte. C’est seulement ensuite que nous nous demanderons comment la tragédie peut opérer “complètement” la katharsis de ces passions. Cette question nous conduira à préciser la notion d’anagnôrisisde reconnaissance — qui qualifie le second volet du diptyque tragique : le dénouement  (lusis) en effet est accompagné de reconnaissance, la crainte et la pitié se portant plutôt sur le nouement (desis) et surtout sur le coup de théâtre (peripeteia). Tout se passe comme si la reconnaissance avait la valeur d’une purification de la crainte et de la pitié.

       

      Tout en ressemblant à ce qui s’opère dans la fête médiévale, le carnaval, où un dérèglement temporaire permet la “purgation” des tendances asociales, des craintes collectives, et le retour à une acceptation des normes et des contraintes de la société, la catharsis de la tragédie grecque du Vème siècle est à la fois plus “individuelle” et plus “intégrante”. Comme le montrent Vernant et Vidal-Naquet, en elle s'expriment les contradictions entre l'ancienne culture mythique et les nouvelles valeurs de la Cité, en particulier entre l'ancienne conception de la justice divine et une nouvelle justice “humaine” en train de se constituer. La catharsis purgerait le spectateur des terreurs liées à l'ordre incompréhensible et terrible des dieux et de la pitié envers le héros qui est la victime. Mais la pitié est alors perçue comme passion inhibante, inséparable de la terreur. Débarrassé de ces terreurs le spectateur accède à la rationalité et à la responsabilité civique nécessaires au fonctionnement de la Cité.

       

      A- La crainte et la Pitié

       

      Key concepts

      Dans le contexte de la tragédie, le pathos est l'ensemble des émotions de crainte et de pitié que la représentation dramatique suscite chez le spectateur. Ces émotions sont centrales dans la rhétorique de la mimêsis tragique et créent une expérience émotionnelle contradictoire chez le spectateur, qui est à la fois attiré et repoussé par l'effroi et la souffrance des personnages.

      Le théâtre tragique est qualifié de dionysiaque car il plonge à la fois le spectateur et l'acteur dans des excès émotionnels intenses. L'acteur se perd dans les passions qu'il représente, devenant véritablement autre, et le théâtre devient un espace où le monde humain se mêle au divin. Cette approche contraste avec la vision de Diderot, qui prônait un détachement émotionnel chez l'acteur.

      Aristote met en garde contre la dégénérescence de la tragédie vers une esthétique du sensationnel, où l'accent est mis sur les effets spéciaux et la violence des images au détriment de l'harmonie et de la structure narrative. Cette dérive affaiblit l'âme des spectateurs et détourne la tragédie de son objectif cathartique, qui est de structurer les passions dans un muthos cohérent.

      Dans la tragédie, la crainte et la pitié doivent provenir de l'agencement des actes plutôt que des personnages eux-mêmes. Aristote souligne que l'importance réside dans la structure narrative, qui doit émouvoir même sans mise en scène. Un parallèle est fait avec le roman policier, où l'efficacité dramatique prime sur la psychologie des personnages. Ainsi, la narration puissante est privilégiée pour susciter des émotions, comme dans le récit d'Œdipe.

      Le coup de théâtre est un renversement de situation qui incarne l'ambivalence tragique, partageant le spectateur entre effroi et compassion. C'est le point culminant de l'émotion tragique, marqué par une péripétie ou une reconnaissance. Ces moments créent un lien émotionnel profond entre l'action et le spectateur, mettant en avant le rythme de l'action plutôt que la souffrance des personnages.

      Aristote valorise la mimêsis pour sa capacité à offrir un enseignement par la représentation, permettant une distanciation émotionnelle. Même les images choquantes doivent servir l'intrigue et non dominer la logique du drame. L'horreur doit être subordonnée à l'agencement des actes (muthos). Il existe une tension entre le plaisir esthétique et le risque de déviation émotionnelle, bien que cette inquiétude reste implicite.

      Quelles sont les deux émotions centrales du pathos dans la tragédie selon Socrate ?

      La crainte et la pitié.

      Comment Aristote décrit-il l'impact de la tragédie sur le spectateur ?

      Il insiste sur le fait que la tragédie doit émouvoir le spectateur en suscitant la crainte et la pitié.

      Quel est le risque que la tragédie court selon Aristote ?

      Le risque de dégénérescence vers une esthétique du sensationnel.

      Quelle est la vision de Diderot sur le rôle de l'acteur dans le théâtre ?

      Il prône une forme de détachement émotionnel chez l'acteur.

      Qu'est-ce que Rousseau critique dans la relation entre la scène et la salle ?

      Il dénonce la division entre scène et salle comme une forme de distanciation sociale.

      Comment Aristote perçoit-il le plaisir de la tragédie ?

      Il considère que le plaisir ne réside pas dans l'horreur, mais dans une expérience cathartique intégrée à une narration harmonieuse.

      Quel phénomène émotionnel le pathos tragique génère-t-il chez le spectateur ?

      Une expérience émotionnelle contradictoire, une division intérieure.

      Pourquoi Aristote critique-t-il les tragédies 'pathétiques' comme Ajax ou Ixion ?

      L'acteur se laisse envahir par une passion intense et se transforme en incarnant le personnage

      Quel est le rôle de l'acteur dans le théâtre tragique selon la pensée grecque ?

      L'acteur se laisse envahir par une passion intense et se transforme en incarnant le personnage

      Quel est le rôle de la crainte et de la pitié dans la tragédie selon Aristote ?

      La crainte et la pitié doivent naître des faits eux-mêmes, c'est-à-dire de l’agencement systématique des actes.

      Comment Aristote distingue-t-il le psychologique du dramatique dans la tragédie ?

      Aristote considère que le psychologique est toujours subordonné au dramatique, et que l’adhésion passionnelle porte sur le drame lui-même.

      Quel est l'impact du coup de théâtre dans une œuvre tragique ?

      Le coup de théâtre incarne l’essence de l’ambivalence tragique et cristallise l’émotion dans un suspense intense.

      Comment Aristote définit-il le coup de théâtre ?

      Aristote identifie le coup de théâtre comme le point culminant de l'émotion tragique, marqué par une péripétie ou une reconnaissance.

      Quelle est la position d'Aristote sur la représentation de l'horreur ?

      Aristote affirme que la représentation de l'horreur peut être plaisante et instructive, permettant une distanciation émotionnelle.

      Comment Aristote oppose-t-il sa vision de la mimêsis à celle de Platon ?

      Aristote réhabilite la mimêsis comme un instrument de connaissance, contrairement à la diabolisation platonicienne.

      Pourquoi Aristote insiste-t-il sur l'agencement systématique des actes dans la tragédie ?

      Il considère que l'horreur sur scène doit servir l'intrigue et ne pas détourner l'attention du spectateur.

      Quel est le lien entre le rythme de l'action et l'émotion tragique ?

      Le rythme de l'action est essentiel pour susciter la crainte et la pitié, et il est mis en relief par des retournements spectaculaires.

      Comment la psychologie des personnages influence-t-elle l'efficacité dramatique selon Aristote ?

      Une tentative d’approfondir la psychologie des personnages peut réduire l’efficacité dramatique qui est essentielle au récit.

      Quel est l'objectif moral et pédagogique de la tragédie selon Aristote ?

      L'objectif est de susciter une réflexion sur les émotions humaines tout en évitant une fascination pour l'horreur qui pourrait corrompre cet objectif.

      B- La purification et la reconnaissance

       

      1. La katharsis tragique : un retour à l’équilibre
      Aristote considère la katharsis comme un processus de purification ou d’apaisement des émotions, notamment la crainte et la pitié, que le spectateur ressent face à une tragédie. Contrairement à ce que certains pourraient penser, la katharsis ne correspond pas au paroxysme de ces émotions, mais à leur résolution. Elle vise à restaurer l'équilibre de l’âme, troublée par les passions, en la rendant à nouveau unifiée et apaisée.

      Un exemple clé pour Aristote est une scène d’Iphigénie en Tauride d’Euripide. Iphigénie, exilée chez un peuple barbare, doit sacrifier un étranger inconnu. Mais au dernier moment, elle reconnaît son frère Oreste et suspend le sacrifice. Cette reconnaissance (anagnôrisis) met fin à la violence, sauve une vie et incarne ainsi la véritable essence de la katharsis : non pas la mort, mais la réconciliation et le retour à une harmonie perdue.

      2. La critique de la fascination pour la violence
      Platon et Aristote partagent une méfiance envers les spectacles trop violents ou “à sensation”, qui exacerbent les passions des spectateurs. Selon eux, ces œuvres, qui attisent la curiosité morbide ou la fascination pour la souffrance, risquent de corrompre l’âme plutôt que de l’élever.

      La tragédie, au contraire, apaise cette “démesure” en conduisant l’âme à une forme de pacification. Elle ne glorifie pas le lynchage collectif ou la violence, mais en montre les conséquences pour mieux les transcender.

      3. La musique et la katharsis : une analogie éclairante
      Aristote développe dans La Politique une réflexion sur la musique qui éclaire sa vision de la katharsis tragique. Il distingue deux types de musique :

      • La musique “enthousiaste” ou “passionnelle” : elle excite les émotions comme la peur ou l’enthousiasme démesuré.
      • La musique “sacrée” ou “purificatrice” : elle apaise les passions, ramène l’âme à son état normal et lui procure une joie profonde et innocente.

      De même, la tragédie agit comme une médecine pour l’âme (pharmakon). Elle permet aux spectateurs d’éprouver intensément des émotions pour ensuite s’en libérer, les transformant en une expérience enrichissante et apaisante.

      4. La katharsis, opposée au rite du pharmakos
      Contrairement aux interprétations tardives, qui associent la tragédie à des rites d’expulsion comme celui du pharmakos(le bouc émissaire), Aristote voit la katharsis comme un processus de réconciliation intérieure.

      • Le pharmakos incarne la projection des maux d’une communauté sur une victime, ce qui divise davantage les âmes.
      • La katharsis, en revanche, rassemble l’âme en elle-même et favorise l’unité, non par le sacrifice, mais par la reconnaissance et l’apaisement des passions.

      5. Une philosophie de l’unité et de l’enseignement
      Pour Aristote, la tragédie n’est pas seulement un art, mais une poésie philosophique. En recréant le désordre des passions, elle prépare l’âme à s’élever vers la connaissance et l’harmonie. Cette idée s’inscrit dans une démarche éducative héritée de Platon, qui louait les musiques et les œuvres favorisant le courage et la sagesse, tout en condamnant celles qui provoquent le désordre et la démesure.

      Ainsi, la tragédie rejoint la philosophie dans sa quête d’unité et d’enseignement. Elle aide l’âme à dépasser la tension entre le sacré et le profane, à retrouver la sérénité et à cultiver une forme d’amitié avec elle-même, fondée sur la mémoire et la réconciliation.

       

      Comment Aristote décrit-il la musique 'sacrée' ?

      1. Elle apaise les passions
      2. Elle est réservée aux rituels
      3. Elle est bruyante et chaotique
      4. Elle excite les émotions

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      Quelle est la différence entre katharsis et pharmakos ?

      1. La katharsis est une forme de violence
      2. La katharsis favorise l'unité, le pharmakos divise
      3. Le pharmakos est un processus de purification
      4. Les deux sont des rites de sacrifice

      Quelle est la vision d'Aristote sur les spectacles violents ?

      1. Ils sont nécessaires pour la catharsis
      2. Ils sont sans importance
      3. Ils risquent de corrompre l'âme
      4. Ils élèvent l'esprit

      Comment la tragédie aide-t-elle l'âme selon Aristote ?

      1. En la rendant plus violente
      2. En la conduisant vers la connaissance
      3. En la séparant des émotions
      4. En la distrayant

      Références bibliographiques


      "Un site colossal »

       

      À partir de 2007, Jacques Darriulat met en ligne un site consacré à la philosophie en général et à la philosophie esthétique en particulier. Ce site est singulier par son ampleur (les textes qui s’y trouvent, imprimés en continu, donneraient lieu à 35 volumes de 300 pages chacun) et peut-être aussi par son projet : il s’agit d’inventer une œuvre en devenir d’un nouveau type, échappant au ne varietur de l'édition papier et offrant un paysage textuel en lequel il appartient au lecteur de tracer son propre itinéraire. 


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